top of page

Les pollinisateurs, cette belle diversité !

Magdalena BRUGGER.

3 juin 2024

Bien que nos pensées dérivent généralement vers l'abeille domestique (Apis mellifera) lorsque l'on pense pollinisation, cette espèce est loin d'être la seule à effectuer ce job, et sa forte médiatisation fait bien de l'ombre au groupe si vaste et complexe que constitue l'ensemble des insectes pollinisateurs ! Petits et grands, diurnes et nocturnes, poilus et glabres... les formes et les comportements se doivent d'être variés et complémentaires pour polliniser toutes les fleurs qui façonnent nos paysages ! Mais qui sont-ils ? Et pourquoi donc est-il crucial de conserver cette diversité qui décline ?

En France comme en Europe, la pollinisation par les animaux est exclusivement effectuée par les insectes. En se nourrissant de nectar et/ou de pollen, ils transportent le pollen d’une fleur à une autre et permettent ainsi la fécondation d’environ 80% des plantes à fleurs, cultivées comme sauvages. Ces pollinisateurs appartiennent principalement à quatre ordres d’insectes : les hyménoptères, les diptères, les lépidoptères et les coléoptères.


Les lépidoptères sont les papillons de jour et de nuit, même s’il est préférable d’utiliser les termes respectifs de « rhopalocères » (i.e. antennes filiformes se terminant en massue) et « hétérocères » (i.e. tous les autres types d’antennes). Ils représentent environ 5 700 espèces dans le pays, dont 95% d’entre elles sont hétérocères. Bien que certaines espèces ne vivent que quelques jours et ne se nourrissent pas, la plupart des adultes de cet ordre se nourrissent de nectar et jouent ainsi un rôle essentiel dans la pollinisation.



Gonepteryx rhamni (M.Brugger)
Aglais io (M.Brugger)

Les diptères désignent entre autres les mouches, les taons, les moustiques, les moucherons ou encore les syrphes, et sont près de 10 000 espèces en France. Bien que les larves appartenant à cet ordre puissent avoir des régimes alimentaires très variés (e.g. coprophages, détritiphages, nécrophages), la très grande majorité sont floricoles au stade adulte. Il a été démontré notamment que les diptères (notamment les Empidinae) remplaçaient les abeilles pour la pollinisation dans les milieux d’altitude. Plus spécifiquement les syrphes, ces mouches au vol stationnaire et qui imitent les hyménoptères pour se protéger, sont considérés comme des pollinisateurs efficaces mais aussi d’excellents auxiliaires des jardins et des cultures puisque les larves de certaines espèces se nourrissent massivement de pucerons.


Episyrphus balteatus (M.Brugger)


Avec environ 12 000 espèces en France, les coléoptères représentent l’ordre le plus vaste d’insectes. On les reconnait notamment à la présence d’élytres recouvrant leurs ailes. Une partie des coléoptères est également floricole au stade adulte, et bien que certaines grosses espèces comme la cétoine dorée (Cetonia aurata) puissent causer certains dommages à la fleur en la « broutant », les coléoptères sont considérés comme des pollinisateurs essentiels pour un grand nombre de plantes. On y retrouve de nombreuses familles, comme les Œdémères, les Chrysomèles, les Buprestes, les Coccinelles, les Longicornes, etc.

Chrysanthia viridissima (M.Brugger)


Stenurella_bifasciata (M.Brugger)


Enfin, les hyménoptères sont représentés bien évidemment par les abeilles, mais également plus largement par les guêpes, les frelons, les fourmis, les symphytes, etc. qui pour la très grande majorité sont pollinisateurs à l’âge adulte. Les abeilles, domestique comme sauvages, ont quant à elles la spécificité de dépendre des ressources en nectar et en pollen tout au long de leur vie, puisque les adultes, en plus de se nourrir sur les fleurs, récupèrent le pollen à l’aide de structures de récolte spécifiques pour nourrir leurs larves également. De ce fait, elles sont des pollinisatrices très efficaces, et on retrouve près de 1000 espèces en France.




Bombus hortorum ( M.Brugger)

Des espèces appartenant à d’autres ordres peuvent également polliniser (punaises, chrysopes, etc.) mais leur rôle reste anecdotique. Au total, on compte près de 20 000 espèces floricoles sur le territoire français, soit autant de manières différentes de polliniser les fleurs. En effet, toutes ces espèces présentent des différences morphologiques (longueur de la langue, présence de poils, type de structures de récolte du pollen) mais également des différences écologiques (pollinisation pour certaines à des températures plus basses que d’autres, à différents moments de l’année ou de la journée, etc.). Et c’est finalement cette diversité qui rend les pollinisateurs essentiels dans leur ensemble.


Pourtant bien qu’indispensables, les pollinisateurs comme le reste des insectes sont en péril. Sont en cause la perte et la fragmentation de leurs habitats, mais aussi l’intensification agricole avec notamment la mise en place de monocultures intensives, l’usage massif de pesticides, l’introduction d’espèces invasives ou de pathogènes ou encore le réchauffement climatique.

Afin d’enrayer ce déclin, il est donc indispensable de repenser notre rapport à la nature et plus spécifiquement à l’agriculture et ainsi redonner aux insectes pollinisant les fleurs de nos paysages la place qu’ils méritent.

Magdalena Brugger est chargée de mission, entomologiste à la SHNA-OFAB






bottom of page