Bernard Morin
5 déc. 2022
Le temps obsède les hommes alors, depuis la nuit des temps, il tente de le mesurer. Une conférence de Bernard Morin.
Rarement signalé dans les circuits touristiques, rustique ou extrêmement sophistiqué, le «cadran solaire», est capable de rassembler mathématique et poésie, art et astronomie, histoire et philosophie.
En évoquant ses origines, nous avons essayé de le comprendre, le reconnaître parmi ses multiples formes originales, le croiser au détour de chemins régionaux, apprendre à y lire l'heure légale et admirer sa beauté.
Mesurer le temps en mesurant l'ombre:
Mystérieux, irréversible, de structure à la fois linéaire et cyclique, le "temps" imposait, à la vue des hommes le ballet des astres dans le ciel et déterminait leurs activités par l’alternance du jour et de la nuit, la ronde des saisons. Pour conjurer son impuissance à comprendre sa nature, l’humanité, dès sa sédentarisation, a essayé de le domestiquer par la mesure.
Néolithique, le mesureur d'ombre, donne le temps du soleil. C'est d'abord l'instrument de la vie agricole, puis celui de la vie civique et religieuse. Il permet d’organiser les journées, la gestion des horaires de travail, des prières et des annonces (cloches, criées, etc.) qui en découlent, l’ouverture et la fermeture des portes des villes. Ainsi naît le savoir faire de la gnomonique, première science mathématique, vieille de trois millénaires, qui poursuit toujours sa carrière de nos jours, laissant le temps légal aux horloges et aux médias.
Le gnomon, le polos, le merkhet, le cadran solaire et d’autres mesureurs d’ombre surprenants participent à cette vaste entreprise. Dès l’antiquité, le cadran solaire est placé à la croisée des chemins. Au moyen âge, on installe le canonial sur les cathédrales et les églises, marque lapidaire de petites dimensions que l’on trouve sur les façades sud des édifices religieux médiévaux sans aucune indication chiffrée. Le moine responsable surveille le mouvement de l’ombre et tire la cloche, invitant ses confrères à sortir du repos ou du travail pour l’office.
Une enluminure, permet de dater de la première moitié du XVème siècle des instruments que l’on croyait postérieurs.
Reconnaître un cadran moderne et comprendre ses tracés
Les méridiens de la sphère céleste, espacés de 15° (360/24), se projettent sur la table du cadran en formant les lignes horaires, l’équateur se projette suivant la droite équinoxiale et les deux tropiques suivant deux hyperboles, les arcs diurnes.
Les tracés des multiples cadrans dérivés sont obtenus à partir de ce principe de base.
De nombreuses pièces remarquables ont été présentées: équatorial, armillaire, horizontal, polyédrique, gouttière, vertical méridional, septentrional, oriental ou occidental, analemmatique...
Après avoir vu comment convertir l'heure mairie en heure gare, l'intervention s'est terminée par la dégustation de quelques devises horaires poétiques ou philosophiques et la présentation de quelques cadrans remarquables: bagues, montre cadran, diptyque, montre de berger, capucin de St Rigaud ...
En espérant que l'ombre de l'axe du monde des cadrans que vous découvrirez au détour d'une ballade écrira un jour un petit mot pour vous.