Samy MAZANI (Administrateur AOMSL et Chargé de missions Faune sauvage à la SHNA)
2 juin 2025
Le recensement de l’avifaune depuis plus de 30 ans confirme que de trop nombreuses espèces ont connu un fort déclin au cours des trois dernières décennies. Les causes sont multiples dont le changement climatique.
Cependant certaines résistent et d’autres tirent profit des modifications écologiques
Le changement climatique actuel a déjà eu des répercussions importantes sur nos oiseaux sauvages.
Aptes à se déplacer rapidement, et sur de longues distances, les oiseaux semblent réagir rapidement, bien que nous ne puissions pas tout appréhender actuellement.
L'exemple le plus frappant, qui marque par exemple le paysage ornithologique de Saône-et-Loire, est l'apparition et l'expansion vers le nord d'espèces méridionales, voire strictement méditerranéennes.
Ainsi le Héron garde-bœuf est l'un des exemples les plus spectaculaires ; il accompagne désormais couramment nos troupeaux de bovins, si emblématiques de notre département.
La Fauvette mélanocéphale est un oiseau du climat méditerranéen, sédentaire, souvent lié à la présence du chêne vert. Si elle sait affronter l’hiver, elle craint la neige et la limite septentrionale de répartition a souvent été considérée à Valence.
Cependant, en 2021, un puis deux oiseaux ont été entendus, les hivers froids qui ont suivis l’ont fait disparaître mais elle est retrouvée aujourd’hui au sud du département (Soluté, Pouilly) .
Observations comparables pour la Cisticole des joncs et la Bouscarle de Cetti.
L’Elanion blanc est un oiseau qui niche en Afrique, puis en Espagne, en Aquitaine, il remonte la vallée de la Loire et y niche depuis quelques années.
Le guêpier d’Europe est en forte expansion jusqu’au Nord de la France, mais sa présence n’est pas uniquement liée aux années chaudes : par exemple l’exploitation importante des graviers du Doubs a dégagé les berges , action favorables à leur nidification.
Le Pigeon ramier ou palombe, ce grand migrateur est beaucoup chassé et pourtant sa population augmente ; Il ne migre plus et devient un sédentaire abondant à Paris
De même, la chaleur urbaine a permis une augmentation de la population de Rouge queue noir
Certaines espèces sont en régression mais le dérèglement climatique n’en est pas l’unique cause, même s’il y contribue. Citons par exemple :
- Le Bouvreuil pivoine et la Chouette de Tengmalm qui souffrent de l’enrésinement
- Le Martiner noir : la diminution des trous dans les façades réduit les possibilités de nidification
- Le Courlis cendré niche au sol dans les prairies humides ; la fauche plus précoce, le remplacement par la maïsiculture nuisent à la reproduction
- Le retour du Busard cendré et de l’hirondelle de leur migration est trop hâtif : le risque de mortalité lors des vagues de froid tardives et le manque d’insectes leur sont défavorables.
Cependant, certaines espèces voient leurs effectifs en augmentation ; là aussi la cause est multi factorielle :
Le Martinet à ventre blanc, le Hibou grand duc, le Grand Corbeau (très présent dans la Massif central) la Tourterelle turque (une mutation génétique lui permet de supporter le froid), l’Ouette d’Egypte (échappée de captivité)
Conclusion
Ces cas plus discrets, ou inattendus, montrent que le réchauffement est à l'œuvre, et a des répercussions plus négatives, rapides et inquiétantes.
Mais l'évolution actuelle de nos peuplements d'oiseaux ne saurait être expliquée que par le climat. Attention aux rapprochements trop hasardeux ou à l'oubli des répercussions bien plus massives des changements de pratiques dans nos espaces agricoles, forestiers ou urbains !
Photographes: Marcel Dumas, Daniel Magnin, Frédéric Tillier